À ça πŸ‘Œ d’être un simulateur de marche

Critique de Paper Mario : The Origami King (Intelligent Systems, 2020)

Le sermon sonne ainsi : au commencement, Nintendo fit (faire) des JRPG avec Mario, et ces jeux furent bons. En 2004 parut Paper Mario : La Porte millénaire, et les possesseurs de GameCube se réjouirent, eux qui n’avaient que 3 JRPG sur leur console, dont 2 avec des bateaux qui volent. Et puis, les cadres maléfiques de Nintendo, affolés de voir leur mascotte vivre des histoires avec des personnages qui disent des textes avec des mots, condamnèrent les pauvres développeurs d’Intelligent Systems à ne plus jamais faire de JRPG Mario, uniquement des produits dérivés où on ne gagne plus de points d’expérience, et où les PNJ sont tous des Toad qui ne disent que des sottises méta pour dissimuler l’absence délibérée d’une moindre esquisse de scénario. Soit. Moi aussi j’ai joué à La Porte millénaire quand j’avais 15 ans, moi aussi j’ai le souvenir d’une vraie grande aventure. Et j’ai une excellente mémoire. Inutile de ressortir le disque et de passer 20 heures dessus pour m’en assurer. Et puis, je ne change jamais d’avis.

À propos des JRPG, par exemple : je les ai toujours détestés. S’arrêter de jouer toutes les 10 secondes pour appuyer à répétition sur Croix pendant 1 ou 2 minutes, vous trouvez ça amusant vous ? Pour chaque jeu comme Dragon Quest ou Pokémon où le combat *est* le jeu, il y en a 5 à côté de la plaque qui s’imaginent que sans la Sinusoïdale de l’Emmerdement (une courbe qui baisse en gagnant de l’XP, puis remonte quand les ennemis en gagnent), leur aventure ne vaut rien. D’autres génies l’ont dit avant moi : si Final Fantasy VII était un jeu d’action plutôt qu’un JRPG, son scénario n’en souffrirait pas pour autant. Déconstruire les mécaniques des JRPG sera toujours un acte salutaire à mes yeux, et c’est ce bien que The Origami King cherche à faire. Les fans, curieusement, semblent s’en contenter à présent, eux qui méprisaient les Paper Mario précédents pour la même raison.

C’est vrai qu’Origami King est agréable, qu’il est plutôt marrant, qu’on ne s’y ennuie guère, alors qu’on n’y fait pas tant de choses que cela, hormis lire les vannes des Toad et enchaîner des mini-jeux très classiques (et des micro-actions compulsives, une habitude chez Nintendo depuis les Korogus de Breath of the Wild). Sans cela, je ne lui aurai peut-être pas pardonné sa réponse maladroite à la Sinusoïdale de l’Emmerdement : des combats en jeu de pousse-pousse, où tout s’arrête le temps qu’il vous reste de l’argent (vous en aurez des tas), juste pour la satisfaction médiocre d’avoir aligné 4 goombas les uns derrière les autres. Plus tard dans le jeu, un bouton vous permet de dépenser 1000 pièces pour que le pousse-pousse se résolve tout seul. Donc, le progrès selon Paper Mario, c’est que maintenant il suffit d’appuyer une seule fois sur Croix pour gagner ? On est passé à ça d’un simulateur de marche. J’imagine que c’est à ce prix-là que les fans sont contents.

Après coup : Ça se voit que je viens de faire le début de Yakuza: Like a Dragon (Ryu Ga Gotoku Studio, 2020) ? Celui avec ses 2 minutes de combat pour 1h30 de cinématiques ? On verra bien si Sega me fait mentir.

πŸŽ‡ gemini://ailepet.pollux.casa/gemlog/2021-10-18_Paper_Mario_The_Origami_King.gmi